Peut-on vraiment transmettre ses biens comme on l’entend ? La loi protège certains héritiers pour garantir une succession équitable et sans conflit !

En France, même si chacun est libre de rédiger un testament, il n’est pas possible de léguer la totalité de ses biens à qui l’on veut. Une partie du patrimoine est automatiquement réservée à certains héritiers protégés par la loi : c’est la réserve héréditaire. Ce principe fondamental du droit français vise à garantir l’équité entre les enfants et à protéger la famille du défunt contre toute forme d’exclusion successorale. Pourtant, beaucoup de personnes ignorent qu’elles ne peuvent pas léguer librement la totalité de leurs biens, ce qui provoque souvent des conflits familiaux. Découvrez tout ce que vous devez savoir pour une succession sereine et sans injustice.
En bref – Réserve héréditaire
- La réserve héréditaire est un pilier du droit français, garantissant à chaque héritier une part minimale d’héritage.
- Si elle peut sembler contraignante, elle assure avant tout une transmission équitable et apaisée, dans le respect des liens familiaux.
La réserve héréditaire : une protection inscrite dans la loi
Selon le Code civil (articles 912 à 930), la réserve héréditaire correspond à la fraction du patrimoine qu’un défunt doit impérativement transmettre à ses héritiers dits “réservataires”. Autrement dit, même avec un testament, on ne peut pas déshériter totalement ses enfants ou son conjoint survivant.
Cette règle vise à éviter les injustices familiales et à préserver un équilibre entre la volonté personnelle du défunt et la solidarité familiale.
Qui sont les héritiers réservataires ?
La loi désigne clairement les personnes bénéficiant de cette protection :
- Les enfants du défunt, qu’ils soient légitimes, naturels, adoptés ou issus de différents mariages.
- À défaut d’enfants, le conjoint survivant devient héritier réservataire.
Les autres membres de la famille (parents, frères, sœurs, neveux, etc.) ne bénéficient pas de ce droit. Le défunt peut donc choisir de ne rien leur léguer.
Comment se calcule la réserve héréditaire ?
Le montant de la réserve dépend directement du nombre d’enfants laissés par le défunt :
| Nombre d’enfants | Réserve héréditaire | Quotité disponible (part libre) |
|---|---|---|
| 1 enfant | 1/2 du patrimoine | 1/2 |
| 2 enfants | 2/3 du patrimoine (1/3 chacun) | 1/3 |
| 3 enfants ou plus | 3/4 du patrimoine (répartis à parts égales) | 1/4 |
📝 Exemple :
- Une mère laisse un patrimoine de 450 000 € et deux enfants.
- La réserve héréditaire est de 300 000 € (soit 150 000 € chacun).
- Elle peut disposer librement des 150 000 € restants, par exemple au profit d’une association ou d’un proche.

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Cas particuliers : conjoint survivant, familles recomposées et absence d’enfants
- Si le défunt n’a pas d’enfants, le conjoint survivant devient réservataire à hauteur de 1/4 du patrimoine.
- En l’absence d’enfants et de conjoint survivant, il n’y a pas de réserve héréditaire : la personne peut alors léguer 100 % de ses biens librement.
- Dans le cas d’une famille recomposée, la réserve profite uniquement aux enfants biologiques ou adoptifs du défunt, pas à ceux de son conjoint.
Que se passe-t-il si la réserve n’est pas respectée ?
Si le défunt a fait trop de donations ou rédigé un testament empiétant sur la réserve, les héritiers lésés peuvent demander une réduction des libéralités. Cela signifie que les donations ou legs excédentaires seront diminués ou annulés pour rétablir la part légale de chaque héritier réservataire.
📝 Exemple :
Un père laisse 300 000 € à un seul de ses deux enfants dans son testament.
L’autre peut saisir le tribunal pour obtenir la part minimale à laquelle il a droit : 150 000 €.
La quotité disponible spéciale entre époux
Un époux peut, grâce à une donation au dernier vivant, augmenter les droits de son conjoint survivant au-delà de la quotité classique. Le conjoint pourra alors recevoir :
- Soit l’usufruit de la totalité des biens,
- Soit 1/4 en pleine propriété et 3/4 en usufruit,
- Soit la pleine propriété de la quotité disponible.
Cette option est souvent utilisée pour protéger le conjoint, notamment dans les familles recomposées.
Les successions internationales : un cas à part
Dans certains pays, notamment anglo-saxons (Royaume-Uni, États-Unis, etc.), la réserve héréditaire n’existe pas. Un résident français vivant à l’étranger pouvait donc, jusqu’à récemment, contourner cette règle en choisissant la loi du pays de sa résidence.
Depuis la loi du 24 août 2021, les héritiers réservataires peuvent tout de même revendiquer leurs droits sur les biens situés en France, même si une loi étrangère s’applique à la succession.
Peut-on contourner la réserve héréditaire ?
En France, il est impossible de déshériter totalement un enfant, sauf cas très rares (crimes, violences, etc.). Cependant, certaines stratégies permettent d’aménager la répartition :
- L’assurance-vie : elle n’entre pas toujours dans la succession, sauf en cas d’abus manifeste.
- La donation-partage : permet d’organiser la transmission entre héritiers tout en respectant la réserve.
- Le choix du régime matrimonial : certains régimes (comme la communauté universelle avec clause d’attribution intégrale) avantagent le conjoint survivant.

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Pourquoi la réserve héréditaire suscite-t-elle des débats ?
Certains estiment qu’elle limite la liberté testamentaire, notamment dans les familles recomposées où l’on souhaite avantager un nouveau conjoint ou les enfants de ce dernier. D’autres défendent ce principe, y voyant une garantie d’égalité et de solidarité intergénérationnelle.
À titre de comparaison, plusieurs pays européens comme la Belgique, la Suisse ou l’Espagne ont déjà réduit l’importance de la réserve pour accorder davantage de liberté aux testateurs.
Bien préparer sa succession : les conseils à retenir
Pour éviter tout litige après un décès, il est recommandé de :
- Faire un testament conforme à la loi.
- Informer ses proches de ses volontés pour éviter les surprises.
- Anticiper via une donation-partage ou un contrat de mariage adapté.
- Consulter un notaire avant tout acte important.
En résumé
| Nombre d’enfants | Réserve héréditaire | Quotité disponible |
|---|---|---|
| 1 enfant | 1/2 | 1/2 |
| 2 enfants | 2/3 | 1/3 |
| 3 enfants ou plus | 3/4 | 1/4 |
| Aucun enfant + conjoint survivant | 1/4 | 3/4 |
| Aucun enfant, aucun conjoint | 0 | 100 % libre |
FAQ – Tout savoir sur la réserve héréditaire
La réserve héréditaire est la part du patrimoine protégée par la loi. La quotité disponible est la portion que le défunt peut léguer librement.
Non, sauf cas d’indignité (violences, abandon, crime contre le parent…).
Oui, si leurs parents (les enfants du défunt) sont décédés avant lui. Les petits-enfants viennent alors à leur place dans la succession.
On ne peut pas la supprimer, mais on peut l’aménager via des outils comme la donation entre époux, l’assurance-vie ou la donation-partage.
Oui, depuis 2006, un héritier peut renoncer à l’action en réduction (article 929 du Code civil) pour accepter un partage inégal, souvent dans un cadre familial concerté.
En France, la réserve héréditaire assure à chaque enfant ou conjoint une part minimale d’héritage, protégeant ainsi l’équité familiale. Même si elle limite la liberté de léguer, elle demeure une garantie essentielle d’équilibre et de justice au moment de la succession.
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