Le fakirisme était une pratique très populaire dans les années 30 et persiste encore actuellement dans de nombreux évènements. Le personnage appelé « fakir » est habituellement connu pour faire des tours de magie dans les rues pour gagner sa vie.
Qu’ils soient en Inde, à Paris, ou n’importe où dans le monde, les fakirs semblent réellement être dotés de pouvoirs surnaturels. Selon les documents existants sur le phénomène, ils pratiquent tous à peu près les mêmes tours. Yvon Yva, dans son ouvrage Les Fakirs et leurs secrets, explique la manière dont il est devenu un Fakir. Il a assuré que les actes qualifiés de surhumains qu’il montrait en public peuvent être reproduits par n’importe quel humain. Paul Heuzé, le célèbre démystificateur du fakirisme, est aussi de cet avis. Selon lui, les fakirs ne sont pas faits autrement que nous et leurs actes ont bien des explications rationnelles.
Dans cet article :
Comment expliquer les tours dans les spectacles de fakirisme ?
Dans son livre, Yvon Yva résume en quelques mots le secret des fakirs : maîtriser la douleur par la volonté. Il effectue une longue campagne et voyage durant des années, en France et partout en Europe pour promouvoir son idée. Son histoire le plus incroyable était son opération de l’appendice sans avoir eu recours à l’anesthésie. Mais force est de constater que tous les fakirs ne possèdent pas forcément les mêmes facultés qu’Yvon Yva. Alors comment font-ils pour réaliser ces actes surhumains ?
Les planches à clous
C’est sûrement le tour le plus emblématique des fakirs. Il s’agit d’une planche munie de centaines de clous et sur laquelle le fakir doit s’allonger. Mais pourquoi ces aiguilles ne s’enfoncent-elles pas dans la chair de l’artiste ?
Il est clair que la résistance à la douleur est un mal nécessaire pour effectuer ce numéro. Mais le fakir reçoit quand même un petit coup de pouce de la part des lois de la physique. Paul Heuzé, lors de la démystification de ce phénomène, l’a essayé sur son corps. Il en est arrivé à la conclusion qu’il suffit de répartir son poids sur les pointes des clous pour y arriver.
En effet, si le poids du fakir était posé sur un seul clou, ce dernier s’enfoncerait comme dans du beurre. Mais supposons qu’il y a 100 clous sur la planche, le poids total du fakir sera alors divisé par 100. Et là encore, il fait raidir ses muscles pour empêcher les aiguilles pointues de pénétrer en profondeur. Il faut également veiller à ce qu’aucun clou ne dépasse les autres et supporter beaucoup plus de poids.
La lévitation
Dans les rues, on peut voir des fakirs en lévitation à un mètre de haut avec comme seul appui un bâton à la main. Les yeux fermés, genoux pliés, ils semblent être dans un état profond de méditation. Mais il n’en est rien. En fait, une chaise en bois est rattachée au bâton fixé solidement au sol. La manche de la main de leurs grands vêtements couvre entièrement la structure de la chaise.
L’insensibilité à l’épée ou à la lame
Ce tour était souvent à l’origine de plusieurs évanouissements lors de spectacles de fakirisme. Pendant ce numéro, les fakirs s’enfoncent des fleurets non stérilisés à travers leur corps. Et le plus invraisemblable, c’est qu’ils ne saignent pas durant l’opération.
Selon des professeurs de médecine, la vitesse à laquelle la lame est enfoncée peut expliquer ce phénomène. Une vitesse très lente provoquerait une distension des tissus. La pointe de la lame glisserait sans endommager les parois des vaisseaux sanguins. Toutefois, cette pratique nécessite une excellente connaissance du corps humain et des années d’entrainement. Elle est fortement déconseillée aux amateurs.
Les fakirs charmeurs de serpents
Qui ne s’est pas demandé comment les fakirs réussissent à faire danser un grand cobra sous l’influence de sa flûte ? Est-ce la mélodie qui fait cet effet au serpent ? Encore une fois, la science va nous être utile.
Tout d’abord, un serpent n’a pas d’oreille externe, ce qui fait qu’il n’entend pas les mêmes sons que nous. En fait, il peut l’entendre, mais sous forme de vibrations grâce à leurs oreilles internes. Ils peuvent aussi ressentir les vibrations au sol.
C’est sur ces caractéristiques que le tour va se jouer. Tout d’abord, le charmeur de serpent va taper au sol pour faire sortir le serpent de son panier. L’animal, croyant que sa vie est en danger, se met en position d’alerte et se dresse. Son attention sera ensuite captée par les vibrations de la flûte qui s’agite devant lui. Le cobra doit alors surveiller cet ennemi potentiel et ondule pour suivre ses moindres mouvements.
Cependant, effectuer ce tour n’a rien de facile. Le fakir doit se tenir à bonne distance la flûte pour éviter de prendre une attaque directe de l’animal. Aussi, il faut tenir l’animal suffisamment alerte pour qu’il continue de danser.
La catalepsie
C’est un numéro pendant lequel le corps tout entier du fakir devient rigide comme une planche. Ensuite, on pose l’artiste sur des tréteaux au niveau des omoplates et des mollets. Non seulement le fakir tient réellement sa position, mais il peut également supporter un ou même deux hommes debout sur lui.
Encore une fois, ce tour n’a rien de magique et il serait tout à fait possible de le reproduire. L’astuce repose sur un bon positionnement au niveau des omoplates et des mollets. Aussi, il faut rabattre la tête vers l’arrière et essayer d’avoir un dos creux et cambré. Bomber le ventre peut aussi aider. En 2016, l’expérience a été reproduite par des animateurs TV sur scène lors d’une émission en direct.
La corde suspendue
Un voyageur passé en Inde racontait l’histoire d’un fakir indien qui pratiquait cet exercice. Après quelques séances de prière, il sortait une corde d’un panier d’osier et le lançait en l’air. Comme par magie, celle-ci restait suspendue dans l’air. Ensuite, le fakir demande à son assistant de grimper sur la corde sur quelques mètres pour disparaître dans la nature.
Mais en réalité, ce spectacle repose sur le talent des acteurs pour jouer avec la lumière. Effectivement, le tour débutait toujours à la tombée de la nuit. Les assistants du fakir mettent des lanternes à des points bien choisis pour illuminer la scène, ou plutôt, cacher le trucage.
Au départ, le fakir montre au public qu’il s’agit d’une corde ordinaire. À un moment dans la conversation, il attache discrètement la corde à un fil mince, invisible dans l’obscurité. Ce dernier remonte jusqu’à une corde horizontale suspendue plus haut, préalablement préparé pour le numéro. Lorsque l’assistant commence à monter, les spectateurs qui le regardent sont éblouis par la lumière des lanternes. De plus, au-delà des 10 mètres, l’obscurité de la nuit l’emporte sur les lanternes, ce qui explique la disparition de l’assistant.
Si la plupart des tours des fakirs sont réellement faisables, ils sont également extrêmement dangereux. Nombreux ont subi des blessures graves et même perdu la vie suite à un spectacle qui a mal tourné. Il est nécessaire d’avoir une parfaite maîtrise du corps humain et des lois de la physique pour être un fakir. Ces artistes ont enduré des années d’entraînement sévère avant d’acquérir un tel niveau d’assurance et d’expérience.
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Le fakirisme dans la culture indienne
Le mot fakir vient de la culture arabe et non de l’Inde, il signifie « pauvre ». En Inde, le personnage est le plus souvent représenté par un ascète faisant des spectacles de rues. La pratique peut prendre un caractère religieux rattaché à l’islam et visant à accéder à la sainteté. Ils sont convaincus que la prière, les macérations et les austérités leur procurent une force surnaturelle d’origine divine.
Dans les années 1930, des travaux sur l’islam et les musulmans indiens rapportent l’existence de fakirs. Ils étaient membres de confréries hétérodoxes affiliés aux ordres des Madârî dans le nord et à celui des Rifâʿî dans le sud. Les fakirs avaient pour rôle d’ordonnateur de cultes des saints et de faiseurs de miracles. À cette époque, ces hommes servaient de médiateur entre le peuple et Allah, remplissant ainsi le rôle de prêtre.
Dans la culture occidentale
Les fakirs de France et de tout l’occident, contrairement à leurs cousins indiens, n’ont aucun lien avec la religion. Ils se présentent plutôt comme des artistes du fakirisme dans les music-halls, dans les fêtes privées, dans les bars, etc. Leurs numéros ont réinventé la discipline en y mettant une touche de modernité, mélangeant magie, mentalisme et un peu d’humour. Déguisés en Indiens, ils faisaient leur campagne de ville en ville, laissant au public une fascination inégalée. Actuellement, leur nombre est considérablement réduit, mais ils continuent de se produire dans des événements privés ou des festivals.
Dans la culture populaire
Si vous avez lu Les cigares du pharaon ou Le lotus bleu de Tintin, vous aurez sûrement vu des fakirs. Dans le premier, le personnage était un être maléfique doté de pouvoirs surnaturels que Tintin a dû affronter. Il peut hypnotiser, dresser des cordes dans le vide et aussi tirer avec sa sarbacane. C’est un personnage redoutable, Tintin a perdu contre lui quatre fois dans le livre. Dans le second, le fakir montre ses dons en spectacle à Tintin. Il marche sur des tessons de bouteilles, transperce son corps avec un couteau et s’assoit sur sa planche à clous. Dans le livre, le fakir était également un voyant et mettait en garde Tintin face au danger qui le menaçait.
Par ailleurs, dans Astérix chez Rahàzade, les héros gaulois rencontrent un fakir appelé Kiçàh. Le personnage a parcouru le monde pour chercher de l’aide chez les héros sur un tapis volant. La pluie n’était plus tombée dans le royaume où il venait et il était venu chercher Assurancetourix. Ce dernier chante si mal qu’il peut faire pleuvoir.
En 2018, L’extraordinaire voyage du fakir est sorti en France. Le film parle d’Aja, un garçon qui a décidé faire le travail de fakir pour emmener sa mère voir la ville de Paris. Celle-ci décède avant qu’Aja ne concrétise son projet. Aja entama quand même le voyage pour honorer sa mémoire. Arrivé à Paris, Aja rencontra Marie, dont il était tombé amoureux. Par un malencontreux hasard, il était séparé de Marie et se retrouve dans un camion pour un voyage à travers le monde. C’est comme cela qu’Aja s’est retrouvé face à toutes sortes d’aventure tout en tentant de retrouver Marie. Le film est une adaptation du roman L’extraordinaire voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea de Romain Puértolas.
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