Sur les réseaux, tout le monde pense être devenu TDAH, pour expliquer leur mal-être, mais voilà un scoop… C’est faux.
Vous l’avez peut-être remarqué : les réseaux sociaux regorgent de posts sur le TDAH (Trouble Déficit de l’Attention avec ou sans Hyperactivité). Chacun semble y voir un miroir de ses propres petites distractions, de ses moments de perte de concentration. Une manière finalement de justifier certains comportements ou de mettre enfin un mot sur leur mal-être.
Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui, après quelques vidéos ou témoignages, se convainquent qu’ils sont TDAH. Mais la réalité est plus complexe. Le TDAH est un vrai trouble neurologique, et non une simple tendance à s’éparpiller.
Alors, pourquoi tout le monde pense-t-il soudainement être TDAH ? Et comment distinguer un vrai trouble d’une distraction passagère ?
Dans cet article :
Le TDAH, un trouble bien réel et souvent mal compris
Avant tout, rappelons que le TDAH est un trouble neurologique, et pas simplement une difficulté de concentration. Il est caractérisé par des anomalies dans le fonctionnement du cerveau qui affectent l’attention, le contrôle des impulsions, et souvent la régulation de l’activité motrice.
Ce trouble est assez bien documenté. Il a été étudié pendant des décennies, même si ses mécanismes ne sont pas encore totalement compris.
Pour comprendre la complexité du TDAH, il faut connaître les trois types principaux de ce trouble. Il y a l’inattention prédominante. Ici, il s’agit de difficultés massives à rester concentré sur une tâche, à finir ce qui a été commencé, ou à ne pas se laisser distraire par des détails.
Il y a aussi l’hyperactivité ou impulsivité prédominante. C’est-à-dire un besoin constant de bouger, une difficulté à rester calme, et une impulsivité difficilement contrôlable.
Enfin, il y a le TDA/H combiné. C’est le type le plus courant, avec des symptômes à la fois d’inattention et d’hyperactivité.
Le TDAH touche environ 5 % des enfants, selon les estimations de l’OMS, et une partie d’entre eux continue d’en souffrir à l’âge adulte. Il ne s’agit donc pas d’un phénomène nouveau, mais de quelque chose qui fait partie du spectre des troubles neurodéveloppementaux.
Les personnes qui en sont atteintes ne peuvent pas simplement « se concentrer » ou « se poser » en faisant un effort. Leur cerveau est câblé différemment. Comme pour une personne autiste, le TDA/H a cette particularité depuis l’enfance, on ne le devient pas en étant adulte.
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Symptômes : bien plus qu’un manque d’attention
Le TDAH ne se résume pas à une simple difficulté de concentration. Voici un aperçu plus complet des symptômes que vivent les personnes atteintes de ce trouble.
- Des difficultés persistantes à se concentrer. Une personne TDAH a du mal à rester concentrée sur une tâche, même si celle-ci l’intéresse. Cela va bien au-delà des moments de distraction que tout le monde peut connaître.
- Des symptômes physiques. Par exemple, de l’hyperventilation, difficulté à respirer, douleurs musculaires, maux de tête…
- Une hypersensibilité. Ce peut être une hypersensibilité émotionnelle, ou encore une hypersensibilité aux sons, à la lumière, etc.
- Une perte rapide d’intérêt. Même pour les tâches importantes, les personnes TDAH peuvent perdre soudainement leur motivation, sans pouvoir se forcer à continuer.
- Une impulsivité marquée. Elles agissent souvent avant de réfléchir, prennent des décisions rapidement, ce qui peut les mener à des erreurs ou à des situations problématiques. L’impulsivité se traduit aussi par des interruptions fréquentes dans les conversations, des achats impulsifs ou des réactions incontrôlées.
- Une hyperactivité. Chez certains, le TDA est accompagné d’une hyperactivité (d’où le H de TDAH). Mais aussi et surtout d’un besoin constant de bouger, de se lever, de faire quelque chose. Les adultes peuvent ressentir cela comme une agitation intérieure ou un sentiment d’urgence constante.
- Des difficultés à se faire comprendre. Les personnes TDAH peuvent parfois avoir du mal à exprimer leurs pensées de manière organisée. Leurs idées peuvent s’enchaîner de manière décousue, ce qui peut prêter à confusion pour ceux qui les écoutent.
- Des oublis fréquents. Ce sont des oublis de tâches, de rendez-vous, de détails importants, ou même le fait d’oublier ce que vous vouliez faire, passer d’une tâche à l’autre sans finir la première… Cela peut sembler anodin, mais ces oublis répétés compliquent souvent la vie quotidienne, que ce soit au travail ou dans les relations personnelles.
- Une organisation difficile. Ranger, planifier, suivre un agenda sont des défis de taille. Pour eux, organiser le quotidien demande un effort colossal.
- Des problèmes de gestion du temps. Les personnes TDAH ont souvent du mal à estimer le temps qu’une tâche leur prendra. Elles peuvent être régulièrement en retard, ou au contraire passer des heures sur une tâche simple.
- Des réactions émotionnelles intenses. Le TDAH peut également affecter la régulation des émotions. Les personnes peuvent réagir de manière exagérée à des situations stressantes, frustrantes ou excitantes.
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Pourquoi tout le monde se sent-il soudainement TDAH ?
Avec l’avènement des réseaux sociaux, tout le monde a accès à des informations, ou plutôt, à des bribes d’informations, sur des troubles et symptômes variés.
En quelques secondes, une vidéo peut montrer des signes de TDAH de manière simplifiée, avec des exemples que tout le monde connaît : difficulté à se concentrer, procrastination, petits oublis, etc. En soi, ces comportements sont normaux et peuvent arriver à tout le monde.
Sauf qu’en s’appuyant sur ces descriptions simplifiées, de nombreuses personnes se retrouvent à s’autodiagnostiquer, pensant qu’elles souffrent de TDAH.
La réalité est plus nuancée : tout le monde connaît des moments de distraction, des baisses d’énergie ou des oublis, surtout dans un monde où l’on est sans cesse bombardé de stimuli et de sollicitations. Mais, le TDAH, ce ne sont pas des moments, c’est une vie.
Les vidéos sur les réseaux sociaux, bien que souvent créées pour sensibiliser, peuvent donner une image incomplète du TDAH. Un autodiagnostic hâtif peut alors se transformer en fausse certitude, détournant ainsi l’attention des vraies personnes concernées par ce trouble.
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La romantisation des troubles mentaux sur les réseaux sociaux
Le TDAH n’est pas le seul trouble concerné par ce phénomène. De plus en plus, les troubles mentaux sont abordés sur les réseaux sociaux et deviennent presque des symboles de mode. Le hashtag #mentalhealth fait des millions de vues, mais parfois au prix d’une simplification excessive.
L’autisme, l’anxiété, les troubles obsessionnels compulsifs, les troubles bipolaires, voire le stress post-traumatique (PTSD) font l’objet de posts « esthétiques » où l’on « romantise » leurs effets.
Bien que cela puisse avoir l’effet positif de briser le tabou des troubles mentaux, cela renvoie aussi parfois une image enjolivée, voire fausse, de la réalité vécue par les personnes concernées. Non, faire une crise d’angoisse, ce n’est pas joli.
Le danger de l’autodiagnostic
Penser que l’on est TDAH sans diagnostic médical peut avoir des conséquences. D’une part, cela risque de minimiser le vécu des personnes qui souffrent réellement de ce trouble, en diluant la gravité du TDAH dans des descriptions simplistes.
D’autre part, s’autodiagnostiquer peut conduire à négliger d’autres causes potentielles des difficultés ressenties. En effet, des symptômes similaires peuvent être le signe d’autres troubles ou même d’une situation de stress intense.
En plus, les personnes qui se diagnostiquent elles-mêmes en TDAH ont tendance à se reposer sur ce diagnostic pour expliquer certains de leurs comportements, mais aussi à exacerber involontairement ces comportements en croyant avoir le TDAH.
Le TDAH est diagnostiqué par des professionnels de la santé, comme des psychiatres ou des neuropsychologues, qui mènent une évaluation approfondie.
Ce processus comprend des tests, des questionnaires, et souvent plusieurs entretiens pour s’assurer que les symptômes sont bien liés au TDAH et non à autre chose. Seul ce parcours permet de savoir si une personne est réellement TDAH.
Obtenir un diagnostic est un acte important, car il permet d’accéder à des solutions et des soutiens adaptés. Dans le cas du TDAH, cela peut inclure des traitements, comme des thérapies comportementales, des aménagements au travail, ou parfois des médicaments. Sans un vrai diagnostic, les personnes qui se pensent TDAH peuvent passer à côté des aides dont elles pourraient bénéficier.
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Le TDAH est un trouble, pas une mode
Si les réseaux sociaux ont permis d’ouvrir la discussion sur des sujets auparavant tabous, il est essentiel de garder une certaine distance. Le TDAH, comme d’autres troubles, est un diagnostic complexe, qui impacte la vie de manière profonde.
Il ne se limite pas à des moments de distraction. Les personnes qui vivent avec le TDAH affrontent quotidiennement des défis dans des domaines variés, que ce soit au travail, dans leur vie sociale ou dans leurs relations personnelles.
« Le TDAH concerne 5 % des moins de 18 ans et 3 % des adultes« , selon l’Assurance maladie. Il y a donc très peu de chance que toutes les personnes qui pensent être TDAH en regardant des vidéos sur TikTok et Instagram le soient vraiment.
Dans un monde de surinformation, la prudence est de mise. Oui, s’informer est important, mais attention à ne pas confondre des traits de personnalité ou des comportements occasionnels avec un vrai trouble de santé mentale.
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