Le concept de la double empathie suggère que les personnes ayant des identités sociales et des styles de communication très différents ont du mal à comprendre les émotions des autres. De nouvelles recherches le remet aujourd’hui en question.
La théorie de la double empathie a été fortement popularisée ces dernières années. Elle s’appuie sur des recherches portant sur des personnes connues pour éprouver des difficultés sociales, telles que les personnes autistes. Cette théorie propose que les personnes ayant des identités et des styles de communication très différents les uns des autres peuvent avoir plus de mal à se mettre à la place de l’autre.
Dans cet article :
La théorie de la double emphatie
Le point de vue dominant en psychologie a été de considérer l’autisme comme une pathologie. Elle serait caractérisée par des déficits dans l’interaction sociale et la communication. Cette perspective blâme souvent les personnes autistes pour avoir des difficultés à comprendre le monde social et l’esprit des autres.
Cependant, les personnes autistes elles-mêmes font souvent état d’un manque de compréhension de la part des personnes neurotypiques (non autistes). Cette difficulté d’empathie mutuelle est ce que le Dr Damian Milton appelle le « problème de la double empathie ».
Des recherches ont suggèré que ce manque de compréhension mutuelle est réel. Des études ont montré que les personnes neurotypiques peuvent avoir du mal à lire les émotions des personnes autistes, ce qui peut potentiellement conduire à des premières impressions négatives. Cela indique que les théories psychologiques actuelles sur l’autisme peuvent être incomplètes.
On peut le comparer à la difficulté de communication entre des personnes qui ne partagent pas une langue ou un intérêt commun. De même, les personnes autistes sont plus susceptibles de se connecter et de se comprendre entre elles car elles partagent une manière similaire de vivre le monde.
Plusieurs limites à la théorie de la double emphatie
Cependant, la récente étude suggère que les choses pourraient être beaucoup plus compliquées que cela. Leur analyse met en évidence plusieurs lacunes dans la théorie de la double empathie :
- Confusion conceptuelle : Il existe une confusion généralisée autour du concept même de double empathie, qui n’est pas clairement défini.
- Champ d’application limité : Les recherches se sont concentrées étroitement sur les difficultés sociales dans l’autisme. Elles ne tiennent pas compte d’autres facteurs d’identité sociale qui affectent l’empathie entre différents groupes, tels que le genre.
- Manque de rigueur scientifique : La théorie ne prend pas en compte la neuropsychologie de l’empathie. Elle confond le concept d’empathie – c’est-à-dire ressentir psychologiquement les émotions que les autres ressentent – avec des phénomènes similaires mais différents, tels que la « mentalisation » (comprendre ce que les gens pensent d’un point de vue différent).
- Méthodologie inadéquate : La plupart des expériences testant la théorie de la double empathie sont confuses. De nombreux chercheurs prétendent étudier la double empathie alors qu’ils ne mesurent pas l’empathie. On, utilise d’autres études comme preuves de la double empathie alors qu’elles n’ont jamais eu l’intention de tester cette théorie.
- Fiabilité limitée : La recherche sur la double empathie s’est largement appuyée sur des rapports subjectifs des expériences des gens. Elle est est beaucoup moins sur une évaluation par des experts), ce qui peut ne pas correctement refléter la réalité.
VOIR AUSSI : Manque d’empathie : Les 5 signes qui prouvent que vous en souffrez
Vers une meilleure compréhension de l’empathie
La nouvelle étude a été menée par Luca Hargitai, Lucy Anne Livingston et Punit Shah. Ces chercheurs estiment que l’affirmation centrale de la théorie n’est pas bien étayée. Être similaire en identité à d’autres personnes ne signifie pas nécessairement que vous avez plus d’empathie pour elles.
Ils suggèrent que la diversité peut en fait améliorer l’empathie et que le problème de la double empathie pourrait être un point de départ pour de nouvelles recherches, mais que l’on devrait affiner. L’étude appelle à davantage de recherches neuroscientifiques, utilisant l’imagerie cérébrale pour observer comment les cerveaux interagissent lors des interactions sociales.
AInsi, de nouvelles pistes de recherche pourraient inclure :
- Recherches en neurosciences : Des technologies d’imagerie cérébrale, telles que l' »hyperscanning » – scanner plusieurs cerveaux humains en même temps – pourraient aider à comprendre comment les cerveaux de personnes différentes interagissent les uns avec les autres.
- Études sur la diversité : Explorer comment le fait de passer du temps avec des personnes différentes de nous peut peut-être stimuler notre empathie est un domaine de recherche prometteur.
- Intelligence artificielle : Déterminer si les machines peuvent vraiment ressentir de l’empathie pour les humains en voyant si elles interprètent correctement nos ondes cérébrales pourrait être d’un grand intérêt.
Finalement, l’empathie est un concept complexe et nuancé que l’on ne devrait pas réduire à une simple question de similarité.
BuzzWebzine est un média indépendant. Soutiens-nous en nous ajoutant à tes favoris sur Google Actualités :