Dans un contexte de mondialisation, les ONG prennent de plus en plus de poids et interviennent progressivement dans les politiques éducatives nationales. Elles remettent ainsi en cause le rôle des acteurs historiques de l’éducation : l’État et la société civile. Le programme PISA illustre l’influence croissante des organisations internationales sur les politiques d’éducation.
Ces organisations sont dotées d’une administration permanente qui coordonne leurs ressources et leurs actions afin d’atteindre des objectifs communs. Le terme « organisation internationale » fait traditionnellement référence au système des Nations Unies, au sein duquel les institutions spécialisées dans l’éducation sont l’UNESCO et l’UNICEF. Parallèlement, il existe d’autres types d’organisations internationales qui jouent un rôle important dans le secteur de l’éducation, comme la Banque mondiale, l’Organisation mondiale du commerce (OMC), l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Chacune de ces organisations a sa propre histoire et donc sa propre vision de l’éducation.
La conception des politiques d’éducation
La présence croissante du terme « valeur-objectif » dans le discours des organisations internationales révèle leur influence sur la conception des politiques éducatives. Les bonnes pratiques circulent entre les mains des experts mais aussi des ONG, des philanthropes et des fondations caritatives à l’image de la fondation Beny Steinmetz ; il faut trouver les moyens de les diffuser dans les pays où le système éducatif est inefficace. Ainsi, les réussites éducatives de l’Asie du Sud-Est sont souvent proposées comme des solutions possibles pour le continent africain dans son ensemble.
En témoignent la grande similarité entre les politiques menées par les différents pays, ainsi que l’émergence des études comparatives telles que PISA, qui placent tous les systèmes éducatifs sous le même microscope et prennent une importance croissante. Nous nous dirigeons donc vers une homogénéisation des modèles éducatifs, et les organisations internationales ont largement contribué à ce phénomène. Bien qu’il existe encore de grandes différences entre les pays, nous sommes de plus en plus confrontés à l’émergence d’un ordre éducatif mondial.
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L’évaluation des systèmes éducatifs
Les années 1980 ont marqué un changement dans le leadership des organisations internationales en matière de politique éducative dans les pays du Sud. L’UNESCO, alors acteur international historique de l’éducation, a été affaiblie par le retrait des États-Unis et du Royaume-Uni, deux des principaux bailleurs de fonds de l’institution. Dans le même temps, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) ont été propulsés sur le devant de la scène de l’éducation dans les pays du Sud, intervenant principalement dans l’assainissement des finances publiques de nombreux pays par le biais de programmes d’ajustement structurel.
Dans le même temps, la Banque mondiale s’est impliquée de manière de plus en plus visible dans le financement de projets dans divers secteurs de l’éducation, notamment la formation professionnelle. Plus récemment, depuis la conférence de Jomtien en 1990, la même organisation travaille à promouvoir l’alphabétisation et l’accès à l’éducation de base dans les pays du Sud. La conférence de Dakar en 2000 a intensifié et renforcé la place de la Banque mondiale dans l’orientation de la politique internationale en matière d’éducation. Le changement de leadership entre l’UNESCO et la Banque mondiale n’est pas passé inaperçu dans le domaine de l’éducation dans la mesure où les deux institutions avaient à l’origine des visions très différentes. L’UNESCO avait une vision humaniste de l’éducation, explicitée notamment dans son rapport publié en 1996. La Banque mondiale, pour sa part, a une vision plus instrumentale : l’éducation doit permettre aux individus de s’intégrer dans l’économie de marché locale ou mondiale.
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Changement progressif
Ce changement s’est produit de manière progressive et non conflictuelle, les deux organisations étant de plus en plus actives dans leur collaboration – bilatérale ou multilatérale – , notamment dans le domaine de l’éducation de base, et ce malgré des références historiques, idéologiques et philosophiques différentes.
Nous avons vu plus haut que l’influence des organisations internationales ne se limite pas aux discours, mais prend la forme d’une action politique forte. Cette influence a toutefois des limites : il faut se rappeler que ces organisations n’opèrent pas en territoire vierge. Elle dépend notamment de la marge de manœuvre des autres acteurs stratégiques du système éducatif. D’autre part, dans les années 1990, et malgré l’existence de contradictions internes majeures – notamment entre les décideurs locaux et les stratèges mondiaux –, les acteurs impliqués dans la coopération internationale pour le développement ont commencé à prendre conscience de la nécessité de remettre en question « l’industrie de l’aide » même si de nombreux employés en étaient fortement dépendants.
L’OCDE a lancé le rapport international PISA, qui occupe désormais une place stratégique dans les politiques d’éducation des pays participants. En comparant les performances et les compétences des élèves au niveau international, ces études comparatives régulières poussent à des réformes politiques pour améliorer les performances du système éducatif, toujours dans le contexte de la compétitivité économique internationale.
Pour l’OCDE (1995), ce qui est envisagé est une nouvelle relation entre l’État et le secteur public, notamment par l’exploration d’alternatives à la fourniture directe de services par le secteur public et par des mesures prises pour que la fourniture de services d’éducation soit basée sur la compétitivité et la favorise. La corporatisation (un mode de gestion de l’éducation axé sur le profit) et la privatisation sont des options politiques importantes pour l’OCDE dans ce contexte. Pour ce qui est de l’OMC, l’AGCS (Accord général sur le commerce des services) de Marrakech a défini, en 1995, la notion de services : ce terme inclut les secteurs de la finance, des transports et des télécommunications, mais aussi la santé, l’éducation et la culture.
L’intégration de l’éducation dans le domaine couvert par les accords commerciaux internationaux a suscité des inquiétudes parmi les acteurs concernés quant à la capacité des pays à réglementer la marchandisation de l’éducation. Selon l’AGCS, un service éducatif peut être fourni à l’échelle internationale de quatre manières : (a) de façon transfrontalière, notamment par le biais de l’enseignement à distance ; (b) par la consommation du service à l’étranger, par exemple le déplacement d’étudiants partant étudier à l’étranger ; (c) par une présence commerciale, notamment à travers l’établissement de campus à l’étranger ; et (d) par le déplacement de personnes physiques, c’est-à-dire le déplacement de spécialistes pour fournir le service éducatif. Nous constatons que ces quatre modes existent déjà dans différentes régions du monde. Ainsi, de plus en plus d’universités américaines, européennes ou australiennes ouvrent des campus offshore au Moyen-Orient et en Asie.
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