Il y a dix ans, nous avions beaucoup plus d’insectes sur nos pare-brises de voitures en roulant, mais pourquoi il y en a moins ?

Vous vous souvenez de ces étés où il fallait s’arrêter à la station-service pour gratter des dizaines de moustiques collés sur le pare-brise ? Ces temps semblent révolus.
Aujourd’hui, même après des centaines de kilomètres sur les routes de campagne, la carrosserie reste presque immaculée. Et s’il paraît anecdotique, il cache en réalité une question bien plus grave : où sont passés les insectes sur nos pare-brises ?
Dans cet article :
Une baisse des insectes de 63 % ?
Depuis une vingtaine d’années, des automobilistes, des naturalistes et des chercheurs le remarquent : il y a moins de traces d’insectes sur les voitures et les pare-brises. En 2024, le programme britannique Bugs Matter a recensé une baisse de 63 % du nombre d’insectes écrasés sur les plaques d’immatriculation par rapport à 2004. Au Danemark, une étude similaire évoquait une chute de 80 % entre 1997 et 2017.
Certes, ces données ne sont pas des preuves directes d’un effondrement massif, mais elles rejoignent une tendance mondiale : la biomasse d’insectes volants recule de façon spectaculaire dans de nombreuses régions, notamment en Europe et en Amérique du Nord.
Des études allemandes, relayées dans Science, ont montré une baisse de 75 % du nombre d’insectes capturés dans certaines réserves naturelles entre 1989 et 2016.
Les insectes sont partout et nulle part à la fois. Ils représentent environ 70 % de la biodiversité animale mondiale, mais passent souvent inaperçus tant qu’ils ne nous gênent pas. Leur déclin, lui, est silencieux : pas de bruits d’ailes qui manquent, pas d’alerte immédiate… juste des pare-brises plus propres, des nuits plus calmes et des prairies plus vides.
Quelles sont les causes de cette raréfaction ?
Mais, quelles sont les causes de cette baisse d’insectes, notamment d’insectes volants ? Il y a plusieurs causes possibles. Premièrement, l’agriculture intensive et l’usage de pesticides de synthèse, notamment les néonicotinoïdes, qui ont décimé les populations d’insectes pollinisateurs et détruit la flore dont ils dépendent.
Deuxièmement, on peut aussi parler de la destruction des habitats naturels : haies, prairies fleuries, zones humides et fossés ont disparu au profit de monocultures et de surfaces artificialisées. Ensuite, il y a aussi le changement climatique : des sécheresses plus longues, des hivers trop doux ou des pluies intenses bouleversent leurs cycles de reproduction.
Et, pour finir, il y a aussi la fameuse pollution lumineuse. Des milliers d’insectes sont désorientés ou épuisés chaque nuit par les éclairages artificiels, perturbant leurs comportements vitaux.

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Moins d’insectes, c’est aussi moins d’oiseaux
Ce qu’on observe sur nos voitures n’est que la surface du problème. Derrière ces pare-brises nets, c’est tout le maillon de la biodiversité qui s’effrite. Les insectes nourrissent les oiseaux insectivores, les amphibiens, les chauves-souris, les petits mammifères. Moins d’insectes, c’est moins de nourriture pour les autres animaux, donc moins de vie tout court.
En Europe, certaines espèces d’hirondelles ou de martinets ont vu leurs effectifs chuter de plus de 40 % en trente ans. Non pas parce qu’ils manquent de lieux de nidification, mais parce que le ciel s’est vidé de leurs proies.
Un problème pour nos cultures ?
Et au-delà de la chaîne alimentaire, les insectes assurent des fonctions irremplaçables : pollinisation, décomposition, régénération des sols. Sans eux, les plantes se reproduisent moins, les feuilles mortes s’accumulent, et les équilibres naturels se dérèglent.
Certains avancent un argument technique : les voitures modernes seraient plus aérodynamiques, laissant passer les flux d’air au-dessus des insectes sans les percuter. C’est en partie vrai. Les véhicules actuels ont des capots plus bas, des pare-brises inclinés et des flux d’air canalisés.
Mais cette explication ne suffit pas. Même les véhicules anciens, utilisés sur les mêmes trajets, ramènent aujourd’hui bien moins de traces qu’autrefois. La raréfaction des insectes est donc bien réelle, au-delà de la simple évolution mécanique.
La question n’est plus de savoir si les insectes disparaissent, mais à quel rythme. Et ce rythme pourrait être rapide : certains chercheurs estiment qu’un tiers des espèces mondiales sont menacées d’extinction d’ici à un siècle.
L’enjeu est colossal. Sans pollinisateurs, une grande partie de notre agriculture s’effondrerait. Selon la FAO, près de 75 % des cultures mondiales dépendent partiellement des insectes pollinisateurs. Leur disparition impliquerait des rendements agricoles en chute, des prix plus élevés et un bouleversement de nos écosystèmes.

Moins d’insectes : que faire ?
À l’échelle individuelle, beaucoup. Laisser pousser des fleurs sauvages, planter local, bannir les pesticides domestiques, réduire l’éclairage extérieur la nuit, soutenir les agriculteurs bio ou ceux qui maintiennent des haies et prairies mellifères.
À l’échelle collective, il faut repenser nos modèles agricoles, freiner l’artificialisation des sols et renforcer la recherche sur les insectes, souvent négligée.
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